Les mines et leur exploitation
L'homme s'est intéressé très tôt aux minéraux puisque certaines exploitations de cuivre et de fer datent de l'âge du bronze (2500 ans avant J.C). A cette époque, les exploitations étaient vraiment sommaires et superficielles mais constituaient déjà une vraie source de richesses à l'origine de conflits. En Gaule, certaines tribus s'étaient ainsi spécialisées dans l'exploitation de la galène argentifère pour la fabrication de monnaies, notamment les Eduens dans le Morvan.
La conquête romaine menée par Jules César fut en partie motivée par les richesses minières de la Gaule. Après leur victoire, les romains relancèrent et intensifièrent l'exploitation de gisements déjà connus et en découvrirent d'autres. Hors de Gaule, l'exemple le plus célèbre est celui des mines d'étain de Cornouailles dont le produit était directement exporté à Rome par bateaux.
Au Moyen-Âge, plusieurs seigneurs locaux voulurent tirer profit des richesses du sous-sol de leur fief. Ils eurent l'idée de faire travailler leurs serfs dans les mines durant l'hiver, quand les champs ne demandaient pas d'entretien. Grâce à cette main d'oeuvre "bon marché", certains gisements furent exploités en profondeur par des galeries étroites creusées exclusivement au pic à la lueur des chandelles! Ce mode d'exploitation se poursuivit juqu'au milieu du 19ème siècle malgré l'utilisation de la poudre noire dès le 16ème siècle pour élargir les galeries.
L'invention de la dynamite par A. Nobel en 1866 a considérablement facilité le travail des mineurs et permis l'exploitation de gîtes plus profonds. A la même époque, la mécanisation est arrivée peu à peu dans les mines... Sous l'influence de ces progrès, la fin du XIXème siècle a vu l'apogée de l'exploitation minière en France. Grâce à une législation très permissive, de nombreux prospecteurs ont tenté de s'enrichir en s'intéressant à des petits gisements souvent peu rentables qui les ont finalement conduit à la faillite... Seules de grandes compagnies (souvent issues de l'industrie chimique ou métallurgique) installées sur des gisements très productifs ont pu maintenir leur activité jusqu'à la fin des années 1980. Aujourd'hui, il n'existe plus de mines actives en France: la dernière mine métallique (les Malines, dans le Gard) a fermé en 1993 et la dernière mine de charbon (Creutzwald, en Lorraine) a fermé en 2004.
Aujourd'hui, en France, c'est le code minier de 1956 qui définit ce qu'est une mine. La notion repose uniquement sur la nature du matériau, que l'extraction se fasse à ciel ouvert ou en sous-sol. Sont concernés, les combustibles, les minéraux et quelques autres matières (sel, soufre). Pour les produits qui ne figurent pas dans la liste, on parle de carrières. Il s'agit notamment des matériaux de construction comme le ciment, les granulats, etc... Mines et carrières relèvent de la législation sur les ICPE (installations classées pour la protection de l'environnement) car elles sont susceptibles de dégrader le paysage, les sols et les milieux naturels. Leur ouverture et leur fonctionnement sont donc soumis à autorisation préfectorale après une étude d'impact préalable.
Si, au regard du Code civil français, la propriété du sous-sol appartient au propriétaire du sol, la gestion du sous-sol minier appartient, elle, à l'État qui peut en concéder l'exploitation à une compagnie minière. Cette dernière peut soliciter la concession pour une durée indéterminée jusqu'à sa renonciation... Selon le Code Minier, l'exploitant doit remettre en état le site avant de renoncer à sa concession. Cependant, il existe aujourd'hui de nombreuses "concessions orphelines" dont le propriétaire a disparu sans avoir renoncé préalablement à sa concession. La réhabilitation de ces sites est donc à la charge de l'Etat qui doit alors tout mettre en oeuvre pour assurer la sécurité du public et la préservation de l'environnement. C'est cette politique qui aboutit actuellement à la destruction du patrimoine minier français
L'allure de la mine est intimement liée aux techniques de creusement. Dans les temps anciens, creuser la roche était très difficile par manque d'outillage perfectionné, les mineurs se contentaient bien souvent de ne retirer que ce qui leur était utile, c'est à dire le minerai : ils procédaient à un abattage sélectif. On peut ainsi observer dans de vieilles mines des galeries de 60 cm de hauteur qui suivent un filon ou une couche.
En règle générale, les mines antérieures au XIX ème siècle sont petites et intégrées dans le paysage. Les exploitations souterraines n'ont pas produit de grandes quantités de déblais stériles et elles sont parfois difficiles à retrouver par manque d'indices visuels.
Dans de nombreuses régions isolées (Massif Central, Alpes...), ces exploitations vivaient avec une économie repliée sur elles-mêmes à cause de l'inexistence ou des grandes difficultés rencontrées par les moyens de communication (pas ou peu de routes). Pendant que les hommes travaillaient à la mine, les femmes et les anciens travaillaient dans les champs et les enfants s'occupaient des troupeaux.
A partir du XIX ème siècle, l'utilisation répandue des explosifs pour le creusement des galeries permet une industrialisation et une rationalisation du travail. Les puits et galeries sont plus grands, les moyens de transport évoluent, à l'intérieur comme à l'extérieur de la mine. Désormais les mines vont marquer le paysage de leurs grands entassements de déblais stériles (les haldes), qui témoignent de tout ce qu'on a arraché d'inutile au sous-sol, juste pour être plus à l'aise à l'intérieur de la mine.
Une mine est constituée de :
Une galerie est constituée :
Cette technique a été utilisée depuis les Romains jusqu'au Moyen-Age. La technique est relativement simple: la roche est chauffée avec un brasero rempli de charbon de bois puis de l'eau froide est projetée sur le front de taille pour créer un choc thermique qui fait éclater la roche en esquilles. L'eau peut être projetée à la main ou bien par l'intermédiaire d'une gouttière. Mais cette technique présente de grands dangers, notamment d'asphyxie par les fumées au fond des galeries.
Cette technique est la technique de base quand aucune autre ne peut être appliquée. Les mineurs utilisent des burins, des coins en fer, des marteaux, des pointerolles, c'est à dire des outils de petite taille lorsque les mineurs procèdent à un abattage sélectif et travaillent dans des boyaux étroits. Ils utilisent des pics, des pelles, des sapes lorsqu'ils ont plus de place, que le front de taille est plus large.
Le percement suit plusieurs étapes. Il faut d'abord creuser le "bouchon". Quatres burins emmanchés ou pointerolles sont enfoncés dans le rocher en un point particulier du front de taille, en général le centre, suivant des directions conformes aux arêtes d'un dièdre ou d'une pyramide jusqu'à ce que la roche éclate en esquille. Après le percement du bouchon il est relativement plus aisé de faire éclater la roche de proche en proche, d'esquille en esquille, en partant du centre vers les parois latérales de la galerie (en rabattant vers le centre les esquilles successivement arrachées).
Les cadences d'avancement n'étaient certainement pas très élevées avec ces méthodes, autour de 10 mètres par an (10 à 50 tonnes de déblais à évacuer).
Au XVIII ème et surtout au XIX ème siècle, les progrès dans les études minières (connaissances géologiques) et surtout dans l'outillage permettent d'augmenter les cadences. On voit apparaître des outils de forage mécanisés: machines à bras, à eau, à gaz, à air comprimé, à electricité permettant d'actionner des perforatrices et des marteaux-burineurs. Les techniques de forage évoluent. On pratique le havage : à partir d'une saignée profonde pratiquée dans une zone plus tendre, on abat le front de taille souvent par gradins successifs du fait de la hauteur qui devient importante.
L'introduction des explosifs ne s'est faite que lentement du fait d'abord de la rareté de ces produits puis à cause du danger de leur utilisation (ils nécessitent la présence d'un spécialiste artificier). On a d'abord utilisé la poudre noire puis plusieurs variétés de dynamite. Les explosifs posent en effet beaucoup de problèmes : ils sont parfois instables, ils sont sensibles à l'humidité et au froid. La dynamite est inerte en dessous de 10°.
Technique : des trous de faible section (3 ou 4 cm) et assez long (1 à 2 m) sont forés à la foreuse obliquement par rapport à la surface travaillée, en plusieurs points de cette surface. Si la roche est stratifiée, les forages seront dirigés perpendiculairement au plan de stratification. Puis des charges d'explosifs sont placées dans les trous, en piquant celles-ci avec une épinglette en cuivre rouge (sorte de tige longue et mince). La charge est poussée au fond, et, sans retirer l'épinglette, le trou est bouché soigneusement avec des fragments de roche non scintillantes (calcaire, argile, schiste, charbon, pour éviter tout risque d'étincelle). Le mineur bourre alors le bouchon formé avec un bourroir (longue tige en cuivre ou en bois terminée par une partie cylindrique comportant une encoche destinée au passage de l'épinglette toujours en place). Le bourrage terminé, le mineur retire l'épinglette et glisse dans l'orifice resté libre une cornette, sorte de papier enduit de poudre dans lequel il adapte une mèche soufrée. Il ne reste plus alors qu'à allumer la mèche et à se sauver en courant. On imagine le danger de ces anciennes méthodes. Aujourd'hui, si la technique reste valable, les matériaux employés sont moins dangereux. Les explosifs sont plus stables, les mèches sont remplacées par du cordeau détonnant sans danger (tant qu'il n'est pas connecté à un détonnateur). L'artificier connecte les différents cordeaux qui proviennent des différents trous de manière à n'en obtenir plus qu'un seul qu'il déroule tranquillement derrière lui en s'éloignant du front de taille. Il n'y connecte qu'un seul et unique détonnateur relié à un cable électrique aussi long que l'artificier l'estime nécessaire pour sa sécurité et enfin, relié à un exploseur (source de courant électrique), il peut être mis à feu. Après l'explosion et la dissipation des gaz, le travail des mineurs consiste essentiellement à déblayer le front de taille en évacuant le minerai abattu manuellement ou à l'aide de petits tractopelles (souvent de marque Eimco).
Dans les roches ébouleuses les mineurs utilisent la pelle et la pioche, dans les roches tendres, des pics, des coins, des masses et des leviers, dans les roches dures et semi-dures, des pics, des pointerolles et des explosifs.
Les pics sont des pointes en acier emmanchées perpendiculairement (1 pointe ou 2 en opposition). Ils pèsent 1 Kg pour le charbon et 3 à 4 Kg pour les roches dures.
Les pointerolles sont des outils en forme de prisme de fer long de 30 à 40 cm, pointu à une extrémité, formant une tête à l'autre, percé en son milieu d'un oeil où on adaptait un manche de 40 cm tenu d'une main par le mineur tandis que de l'autre il frappait avec une massette de 3 à 4 Kg sur la tête de la pointerolle.
Les coins sont des éléments en acier, de forme plate ou à section carrée ou ronde, pointus à une extrémité, enfoncés avec une masse. Ils peuvent être en bois blanc très sec que l'on fait ensuite gonfler en les arrosant d'eau pour faire éclater la roche.
Les barres et les leviers sont des barres de fer, droites ou recourbées, terminées à une extrémité par une pointe, un ciseau ou un pied de biche.
Au Moyen-Age : pas ou peu d'équipement. Les mines sont de petite taille, à peine étayées avec des pieux en bois et la progression des mineurs est très vite stoppée par un accident géologique ou une difficulté imprévue comme un éboulement. Les moyens mis en oeuvre pour l'évacuation du minerai sont dérisoires : ce sont les mineurs qui assurent tout le travail avec des hottes quand la galerie est assez haute pour marcher debout, ou avec des luges en bois qu'ils font glisser sur le sol.
A partir du XVII ème s. des progrès considérables sont effectués. Les études géologiques permettent de mieux exploiter les filons mais aussi de mieux maitriser les dangers liés au percement des galeries. On se prévient contre les effondrements ou les chutes de blocs par un soutènement approprié. On commence à utiliser des machines d'aérage, de pompage de l'eau, des treuils mécaniques, des engins roulants pour transporter le minerai.
Equipement classique d'une mine:
Soutènement : dans des terrains ordinaires, les mineurs avancent le front de taille de 1 ou 2 m, puis le boiseur installe un cadre sur lequel il pose des garnissages, le tout étant calé avec des coins en pression sur le rocher pour prévenir la fissuration et la chute de blocs. Dans des terrains non résistants, le soutènement est généralement réalisé par un muraillement complet en forme de voûte construit en maçonnerie ou en pierres sèches.
Aérage : l'aération des galeries de mine est un problème crucial qui a été résolu très vite dans les mines de petite et moyenne taille de façon très ingénieuse par le percement de petites galeries d'aérage disposées de telles façon qu'elles induisent un courant d'air permanent, en général grâce à un gradient thermique. Mais un tel procédé ne peut suffire pour des galeries très longues ou très profondes.
L'un des problèmes rencontrés est l'augmentation de température du fait de la chaleur dégagée par les hommes, les bêtes quand il y en a, les lampes, les coups de mine, l'oxydation des pyrites, les sources thermales ou simplement l'approfondissement. Un autre problème est la régénération de l'air. L'oxygène est consommé par les mineurs, les bêtes, les lampes avant l'électricité, mais aussi par les réactions d'oxydations. Du dioxyde de carbone se dégage mais aussi des gaz nitreux et des acides carboniques, sulfuriques et sulfureux par l'utilisation des explosifs, ainsi que divers gaz toxiques dûs au choc des outils sur des matières arsenicales et mercurielles. Des gaz peuvent également se dégager naturellement des roches (c'est le cas notamment des charbons). On parle ainsi de coup de gaz carbonique et de coup de grisou. Le grisou est un composé de gaz d'hydrogène protocarboné, C2H4 de 85% à 95%, plus de l'azote, de l'acide carbonique et divers hydrocarbures plus légers que l'air. Le grisou, incolore et inodore, s'accumule ainsi dans les parties supérieures des galeries, n'attendant qu'une étincelle pour exploser. Il provoque chez le mineur, à de fortes concentrations, picotement de nez, malaises, maux de tête et enfin asphyxie. Il brûle avec une flamme bleue au contact d'une flamme et explose au contact d'une étincelle ou d'un corps incandescent (avec 70% à 90% d'air).
Les problèmes d'aérage ont été résolus dans les mines récentes par l'installation de sytèmes de pompage d'air. Une galerie ou un puit aboutissant au plus profond de la mine est spécialement affecté à la ventilation. Un système installé à la sortie de ce conduit pompe l'air de la mine toute entière et l'expluse à l'extérieur. Toutes les autres entrées servant à l'aspiration.
Eclairage : il était réalisé au début de façon individuelle, par des lampes à huile végétale, puis par des lampes électriques à accumulateurs rechargeables en faisant tourner une dynamo. A la fin du XIX ème s. la plupart des mines étaient déjà équipées d'installation électriques fixes, l'éclairage individuel ne servant que d'appoint ou au niveau du front de taille non encore équipé.
Transport : les différents modes de transports sont :
Le moteur de ces différents moyens de transport pouvait être les hommes, des animaux de trait, ou des systèmes de treuils à cable ou chaîne. Dans les grandes mines récentes, c'est une locomotrice électrique qui tirait le train de berlines.
Une fois parvenu à l'extérieur, le minerai était descendu de la mine située sur les versants jusqu'à l'usine de traitement au fond de la vallée au bord de l'eau indispensable, soit par des bêtes de somme ou à dos d'homme, soit plus facilement par des tombereaux (remplacés ensuite par des camions) ou même par un cable transporteur aérien (ce qui implique tout de même une installation et des moyens plus conséquents).
Les méthodes de traitement du minerai ont beaucoup varié au cours des siècles, les progrès réalisés dans ce domaine intervenant directement sur l'exploitation des mines elles-mêmes.
En effet si jusqu'au Moyen-Age les mineurs s'ingéniaient à n'extraire que le minimum des galeries, c'est à dire le minerai lui-même et le moins possible d'encaissant stérile, c'est d'abord parce que creuser la roche leur était très difficile mais aussi parce que la séparation du métal précieux de la masse de stérile n'était pas simple non plus. Aujourd'hui les mineurs abattent le front de taille à l'explosif sans souçi de tri, lequel est effectué plus tard au traitement de façon industrialisée, mécanisée et peu couteuse.
En effet, un des problèmes les plus importants a été pendant longtemps de concasser la roche et de la réduire en poudre pour en extraire le métal. Autant dire qu'avant le XIXème siècle et l'arrivée de machines performantes, les exploitants de mines avaient intérêt à réduire cette étape au minimum. A partir des années 1950, l'apparition de concasseuses puissantes associées à des unités de flotation de grande taille a permis d'augmenter considérablement les rendements sur les principaux gisements français.
Les étapes du traitement du minerai de Plomb au XIXème siècle:
Sur les haldes :
A l'usine de traitement :