L'ancienne province du Velay comprend aujourd'hui les deux tiers Est du département de la Haute-Loire, de la ville de Craponne-sur-Arzon au nord à celle d'Arlempdes au sud, en passant par Yssingeaux et le Puy-en-Velay. Historiquement, le Velay a été très longtemps rattaché à la province du Languedoc et on y parlait donc l'occitan. Il est bordé au nord par le Forez, à l'est par le Vivarais, au sud par les Cévennes et à l'ouest par l'Auvergne (Haut-Allier).
Durant sa traversée du Velay, le fleuve Loire a l'aspect d'une rivière sauvage, coulant la plupart du temps au travers de gorges étroites sauf dans le bassin du Puy. En effet, le Velay est une région de moyenne montagne (altitude moyenne: 900 m) dont le relief s'articule autour du massif du Meygal (1450 m) même si son point culminant est le Mont Mézenc, à 1754 m. À l'est et au nord-est, se trouve le plateau granitique de Tence, au sud, le plateau basaltique du Mézenc, à l'ouest et au sud-ouest, le bassin du Puy-en-Velay et le plateau volcanique du Devès, au nord, le plateau granitique de Craponne-sur-Arzon. Le relief de plateau est interrompu par des vallées profondes où coulent des ruisseaux à caractère torrentiel. Mis à part le plateau du Devès sur lequel est pratiqué la culture de la fameuse lentille verte, les contraintes liées au climat et au relief ont cantonné les exploitations agricoles du Velay au fond des vallées et au sommet des plateaux, les versants et les zones peu fertiles ("terres de varennes") restants couverts de forêts de résineux et/ou de feuillus. La valorisation des terres du Velay a toujours été difficile et seul le secteur du Meygal est encore rentable aujourd'hui grâce à ses nombreux pâturages qui font de lui un centre important de production laitière et fromagère.
Le Velay est entièrement situé sur un grand batholite de granite anatectique qui constituait une des assises de la chaîne montagneuse hercynienne. Ce granite a été formé au Stéphanien inférieur par la fusion totale ou partielle des roches autochtones (gneiss et schistes d'une série métamorphique briovérienne) dans des conditions de pression et de température extrêmement élevées. De telles conditions sont dues à la collision de deux plaques continentales (obduction) au début du Carbonifère. On retrouve souvent des enclaves de roches (xénolithes) n'ayant pas totalement fondu dans ce granite qui est donc très hétérogène (faciès migmatitique). Le granite du Velay est un granite à biotite (mica noir) et à cordiérite (sous la forme de petits nodules verdâtres) mais cette dernière est parfois absente car sa présence semble dépendre de la nature des roches à l'origine du granite. A la fin du Carbonifère (Stéphanien supérieur), ce massif granitique a été localement recoupé par des intrusions de microgranite, de granite porphyrique et de granite à deux micas qui sont de plus en plus nombreuses en remontant vers le nord (Cf. Forez). C'est le cas du grand dyke de leucogranite de Pont de Lignon qui est exploité par une carrière de granulats au sud de Monistrol. Ce leucogranite très fracturé est d'ailleurs faiblement minéralisé en fluorine violette très silicifiée qui tapisse les fissures. Selon la théorie récente du "metamorphic core complex", le granite du Velay et les autres granites qui le traversent ne se sont pas formés en compression mais durant les premières phases de l'extension post-hercynienne qui commença dès le stéphanien. Cette extension aurait permis l'ascension de masses rocheuses en fusion qui avaient été maintenues en profondeur durant la phase compressive.
L'ère Secondaire s'est caractérisée par une intense érosion qui a réduit la chaîne hercynienne à l'état de pénéplaine et mis ainsi à jour le granite du Velay. Au Trias, la région avait l'allure d'une vaste plaine semi-désertique parsemée de lagunes de saumure plus ou moins connectées à l'océan Tethysien. Ce contexte a permis le fonctionnement de plusieurs épisodes d'activité hydrothermale qui se sont déroulés du Trias jusqu'au Lias supérieur (Cf partie Minéralogie).
A l'ère Tertiaire le Velay a été fortement marqué par l'activité tectonique liée à la surrection des Alpes. Cette activité est à l'origine des petites plaines d'effondrement (Bas-en-Basset, Yssingeaux et le Puy) que l'on retrouve dans le prolongement de la grande plaine du Forez située au nord du Velay. Le fossé d'effondrement de Bas-en-Basset (graben de Bas) a été surtout comblé par les alluvions de la Loire alors que ceux d'Yssingeaux et du Puy ont été aussi envahis par des roches volcaniques à la fin de l'ère Tertiaire. Le fossé d'Yssingeaux (graben de l'Emblavès) est en grande partie recouvert par le massif volcanique du Meygal (Miocène) qui présente la particularité d'être formé quasi-exclusivement de phonolite (roche volcanique sous-saturée en silice et composée de felspathoïdes). Les édifices volcaniques de phonolite sont appelés “Sucs” dans le Velay et marquent fortement le paysage. Au sud, l'impressionnant massif volcanique du Mézenc est un ensemble complexe de roches volcaniques basiques (trachy-andésite et phonolite). Le fossé du Puy, séparé du précédent par le horst de Chaspinhac, a quant à lui été recouvert partiellement par le volcanisme basaltique du Devès (Pliocène). Le bassin sédimentaire du Puy s'est formé suite au comblement d'un vaste lac continental par des dépôts successifs d'alluvions (arkoses), de cendres volcaniques (cinérites) et d'évaporites (gypse) durant l'Eocène. C'est l'érosion quaternaire qui a dégagé les dykes basaltiques sur lesquels s'est construite l'ancienne ville du Puy (Mont Anis, Rocher Corneille, Rocher St Michel...). Ces dykes sont en fait des diatrèmes (brèches constituées de débris de socle cimentés par du magma et remplissant d'anciens maars) qui témoignent d'un phréatomagmatisme en milieu lacustre.
1) Les filons à quartz (hydrothermalisme de haute et moyenne température)
La concentration de ces filons, fréquents dans le Velay, est encore plus importante dans le secteur entre Firminy et Monistrol-sur-Loire car cette zone a été soumise à de fortes contraintes tectoniques au Stéphanien comme en témoigne la proximité du bassin houiller de St Etienne. Il s'agit pour la plupart de filons hydrothermaux de moyenne température ayant rempli au Stéphanien/Permien des failles SO-NE qui se sont formées durant l'extension post-hercynienne dans la série métamorphique du Pilat (micaschistes et gneiss). Leur minéralogie est assez banale (quartz, galène, sphalérite, chalcopyrite, pyrite) mais certains étaient suffisamment riches en minéraux métalliques pour faire l'objet de petites exploitations au milieu du XIXème. Ils sont connus aujourd'hui pour les cristaux de quartz de tailles et de teintes remarquables qui y ont été découverts ces dernières années. Ainsi, au sud de Firminy, plusieurs filons contiennent des géodes de quartz fumé dont la couleur est due à une légère irradiation des fluides hydrothermaux. Autour de St Ferreol d'Auroure, des filons plus riches en galène présentent de gros cristaux de quartz laiteux ou légérement fumés. Certains sont recouverts d'une couche de quartz vert évoquant la variété "Prase" ou d'une calcédoine formant des "filaments"!
2) Les filons à barytine-fluorine-sulfures (hydrothermalisme de basse température)
Bien qu'ils soient moins nombreux et moins grands (~1 m de puissance) que ceux du Haut-Allier, les filons hydrothermaux de basse température à barytine, fluorine et sulfures sont bien présents dans le Velay. Ils ont rempli des failles majoritairement orientées NO-SE dans le granite à biotite qui est d'ailleurs souvent fortement altéré au contact des zones minéralisées. Cette altération est due à la circulation des fluides hydrothermaux qui ont dissous le quartz du granite des épontes et transformé le feldspath en kaolin. Certaines failles sont d'ailleurs partiellement remplies d'argile. La paragenèse de ces filons est sensiblement identique à ceux du Haut-Allier mais leur taille modeste fait que les minéralisations y sont moins spectaculaires et donc moins recherchées par les collectionneurs.
Ces filons se répartissent sur trois principaux secteurs: le secteur de Bellevue-Vorey, le secteur d'Yssingeaux-Montfaucon et le secteur de St Martin de Fugères. Ils ont rarement été exploités industriellement car leur mise en valeur a toujours été difficile et trop peu rentable. De ce fait, les quelques mines existantes se sont toutes arrêtées avant la seconde guerre mondiale.
Ce gisement, situé sur le plateau d'Allègre, est exceptionnel en raison de sa taille et de sa paragenèse complexe qui se rapproche de celle des filons du Haut-Allier... Il s'agit en fait d'un faisceau de filons d'orientation N117°E dont le filon principal s'étend de Ceaux d'Allègre (où il est surtout fluoré) à St Geneys (où il est plutôt barytique) soit 8 km de longueur pour 4 m de puissance en moyenne! Encaissée dans le granite du Velay, cette structure s'est probablement mise en place de la façon suivante:
a) Dépôts de quartz fumé à arsénopyrite sur les épontes (Stéphanien/Permien)
b) Réactivation de la faille entrainant un broyage du quartz et sa recristallisation partielle en agate et quartz hématoïde (Permien/Trias)
c) Remplissage par de la fluorine violette/verte massive et du quartz laiteux (début du stade 1 au Trias/Lias inférieur)
d) Dépôts alternés de barytine, de fluorine violette, de pyrite et de quartz cristallisé ou massif, ce dernier étant parfois très épais et géodique (fin du stade 1 au Lias inférieur). La présence de barytine à ce stade est une particularité majeure de ce gisement!
e) Brève et faible venue de fluorine (bleue, jaune ou incolore), de barytine, de quartz et de galène (stade 2 au Lias moyen)
f) Dissolution de la fluorine non protégée par le quartz laissant des vides “caverneux” (pseudomorphoses) dans la structure (fin du stade 2 au Lias moyen)
g) Altération de la pyrite et de la galène (ère Tertiaire) qui va donner des minéralisations secondaires (limonite, pyromorphite, cérusite)
Malgré sa complexité, ce gisement n'a pas une minéralogie très réputée puisque les principales cristallisations ont généralement été dissoutes! Il est donc surtout connu pour avoir donné de spectaculaires pseudomorphoses de fluorine (cubes de 10 cm d'arête) qui laissent seulement imaginer l'aspect des cristaux cubiques ou octaèdriques d'origine! Toutefois, des petites géodes tapissées de quartz abritent parfois des cristaux millimétriques de fluorine bleue, jaune ou incolore. D'autres géodes contiennent des quartz hématoïdes en gerbes d'une taille inférieure au centimètre.
Ce filon a eu une histoire minière très courte puisqu'il a été exploité seulement de 1927 à 1930, les recherches ultérieures menées par le groupe Péchiney (1968) puis par le BRGM (1974) n'ayant pas été concluantes. En effet, le taux de fluorine y est trop faible (~10%) et donc non rentable par rapport à la barytine (~20%) et au quartz (~70%). Une profonde fosse et une descenderie donnant accès au petit dépilage étaient encore visibles en 2009, date à laquelle ces vestiges furent comblés pour des raisons de sécurité. Par conséquent, seuls des travaux agricoles ou de voirie permettent aujourd'hui de récolter quelques échantillons...
Ce gisement se trouve 5 km à l'est d'Yssingeaux, sur la rive gauche du Lignon, en aval du barrage de Lavalette qui a été construit en 1914 pour l'alimentation en eau de l'agglomération stéphanoise. Il s'agit d'un filon unique subvertical d'orientation N70°E et de 1,5 m de puissance en moyenne. En effet, sa puissance varie beaucoup et il est plutôt composé d'une succession de lentilles minéralisées séparées par des "pincements". Il est encaissé dans le granite porphyroïde de Versilhac qui est intrusif dans le granite du Velay. Intermédiaire entre les filons du Vivarais et ceux du Haut-Allier, son remplissage complexe peut se décomposer en 4 étapes principales:
a) Broyage du granite de Versilhac provoquant la formation d'un dense réseau de failles dominé par une faille majeure qui deviendra le filon (Permien / Trias inférieur)
b) Phase mineralisatrice mineure représentée par de faibles dépôts de fluorine violette sur les miroirs de faille (stade 1 au Trias supérieur/Lias inférieur)
c) Phase mineralisatrice majeure (stade 2 au Lias moyen) composée de deux paragenèses différentes en rubannements parallèles:
d) Altération des sulfures primaires et formation de minéraux secondaires (ère Tertiaire) dans les cavités du filon (géodes ou "dead-box" de sulfures).
Ce site est surtout réputé pour ses belles petites cristallisations de fluorine (parfois à fantômes) et pour ses gros cristaux (jusqu'à 4 cm) de galène ou de sphalérite. On y trouve également quelques minéraux secondaires d'altération du plomb (anglésite et cérusite principalement, pyromorphite très rare), du zinc (smithsonite) et du cuivre (bornite, azurite, malachite). Les plus beaux échantillons se composent de cubes centimétriques de fluorine bleue ou jaune associés à des cubes de galène altérés et recouverts de petits cristaux d'anglésite et de cérusite.
Sans doute connu depuis le Moyen-Âge (des vestiges d'anciens travaux ont été retrouvés) mais redécouvert officiellement en 1822, ce filon a fait l'objet d'exploitations sporadiques de 1824 à 1920. La concession fut d'abord acquise en 1827 par MM. Solberge et Royet, industriels à St Etienne et Yssingeaux, pour l'extraction du minerai de plomb jusqu'en 1832. Plusieurs concessionnaires se succèderent ensuite tant bien que mal (Laprade, Mollin et Cie de 1864 à 1868; Deschamp et Cie puis Fabre et Cie entre 1870 et 1908) jusqu'à ce qu'une société d'investisseurs stéphanois baptisée "Société des Mines de Chambonnet-Versilhac" récupère l'exploitation en 1908 et relance l'extraction de la barytine jusqu'en 1919. Une ultime tentative de reprise (de 1950 à 1952 par la Société des Procédés de Gestion) s'étant soldée par un échec, le BRGM récupéra la concession en 1962 pour y effectuer des sondages qui s'avèrerent décevants.
Durant sa période d'activité, la mine de Versilhac se composait de 5 galeries creusées directement dans le filon ("galeries en direction") qui s'étageaient des bords du Lignon jusqu'au cimetière du village. Le minerai extrait était convoyé en tombereaux vers l'usine de transformation (concasseur hydraulique, laverie et fonderie) installée sur le site voisin du Chambonnet. Ce dernier, inclu dans la même concession, est situé sur un filon orienté N110°E qui possède un remplissage quartzo-barytique proche de celui de Versilhac bien que la fluorine y soit rare et les sulfures (sphalérite et galène à 0,02% d'argent) plus abondants. Par conséquent, le filon du Chambonnet motiva le fonçage d'un puits de 100 mètres de profondeur qui fut rapidement délaissé à cause des abondantes arrivées d'eau (la rivière Auze passe à moins de 30 mètres!) au profit de 4 galeries en traçage. A son apogée, cette exploitation était l'une des plus importantes de Haute-Loire mais la concurrence des mines cévenoles et les contraintes d'extraction ont fortement nuit à sa rentabilité.
Aujourd'hui, la végétation a envahi le site de Versilhac et les infiltrations d'eau ont entraîné l'effondrement des galeries. Seul le site du Chambonnet est actuellement valorisé par le musée des traditions du Velay qui y organise régulièrement des visites guidées.
Comme d'autres provinces du massif central, le Velay a été intensivement prospecté pour l'uranium après la seconde guerre mondiale. Cette prospection a permis de découvrir quelques petites minéralisations uranifères qui ont été briévement exploitées par des mines à ciel ouvertes dans les années 1960. Ces exploitations se sont focalisées sur des filons hydrothermaux riches en minéraux uranifères (pechblende, torbernite, autunite) qui sont souvent associés aux minéraux classiques de ce genre de filons (quartz, barytine, fluorine). Ces gisements se concentrent dans un secteur compris entre Craponne-sur-Arzon, La Chaise-Dieu et Bellevue-la-Montagne et sont en relation avec ceux du Forez. Leur formation s'explique par le lessivage hydrothermal de l'uranium naturellement présent dans le granite du Velay puis par son dépôt dans des fissures. Des études du BRGM ont démontré que ces minéraux uranifères se sont probablement déposés dans d'anciennes failles hercyniennes, déjà minéralisées ou non, à l'occasion d'une ultime phase minéralisatrice à l'ère Tertiaire. Cette hypothèse est confortée par le fait que plusieurs filons non uranifères de ce secteur présentent également des fracturations contemporaines de l'orogenèse alpine qui ont été légérement reminéralisées en barytine.
Les minéraux liés au volcanisme sont nombreux mais souvent de taille très réduite car les roches volcaniques refroidissent trop rapidement pour permettre la formation de grands cristaux. Il existe pourtant quelques exceptions, notamment dans le massif volcanique du Meygal. En effet, la phonolite et la trachyte de ce secteur contiennent souvent des cristaux centimétriques de sanidine et des petites vacuoles remplies de calcite et de zéolites variées (thomsonite, offrétite, chabazite, phillipsite, erionite). Une nouvelle zéolite (la direnzoite) a ainsi été découverte récemment dans les basaltes du mont Peylenc, à côté de St-Pierre-Eynac. Ce secteur est aussi connu pour la présence de filons d'opale résinite qui est une roche siliceuse formée à partir d’une activité hydrothermale liée au volcanisme trachy-phonolithique.
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Plusieurs ruisseaux autour du Puy-en-Velay sont connus depuis le Moyen-Age pour les “pierres précieuses” (zircons et saphirs) contenues dans leurs alluvions. Le plus célèbre de ces ruisseaux est le Riou Pezzouliou qui se jette dans la Borne à Espaly-St-Marcel car il a été pendant plusieurs siècles la seule source de saphirs en Europe avant que ne soient découverts les saphirs d'Asie! La plupart des gemmes mesurent de 1 à 5 mm mais leur couleur bleue est particulièrement soutenue. La technique ancestrale utilisée pour récupérer les gemmes consiste à “laver” à l'aide d'une batée les sables lourds piégés par les blocs qui encombrent le lit du ruisseau. Le concentré obtenu doit ensuite être trié à la loupe binoculaire pour y repérer les zircons rouge/orange et les saphirs bleus. L'origine de ces saphirs est encore discutée aujourd'hui... L'hypothèse qui semble se dégager leur donne une origine magmatique, avec une croissance des corindons et des zircons dans un magma trachytique en cours de différenciation suivie d'une remontée par le flot basaltique plus fluide.